S’intégrer ici et garder un contact là-bas : l’usage du téléphone portable

Si la migration est un phénomène ancestral, elle reste tout de même exposée à des changements liés aux transformations sociales, politiques et historiques. Les sociétés évoluent vers un monde de plus en plus connecté et l’utilisation de ces nouvelles technologies devient indispensable pour les exilés. Leur permettant à la fois de garder un lien avec le pays d’origine tout en facilitant leur intégration dans le pays de destination. Elles sont même un outil important dans le processus migratoire lui-même.

A travers cet article, nous verrons brièvement la place qu’occupe le numérique dans le maintien du lien et dans l’action migratoire.

Les réseaux sociaux sous forme de réseaux solidaires.

En 1990, l’acquisition d’un téléphone portable par un exilé était difficile au vu des conditions telles que la position d’un compte bancaire et d’une pièce d’identité. Le mobile était un plutôt un outil communautaire, partagé au sein d’un groupe. C’est ce qu’observe Dana Diminescu. Sociologue et enseignant chercheur à Télécom ParisTech, est coordinatrice de DiasporasLab. Elle s’attache à étudier le lien entre migration et numérique.

Ma première observation a été celle de l’usage d’un téléphone mobile par un collectif de migrants vivant dans un squat. Le téléphone était pour eux une vraie révolution qui leur apportait une aide précieuse. Ils s’en servaient pour développer un réseau, trouver des contacts. Cela leur a permis de trouver du travail, un logement, bref de mieux s’intégrer. Deux ans après, ceux qui vivaient dans le squat étaient sortis de la rue, et le mobile était en bonne partie responsable de ce succès. 

Depuis l’extension du réseau mobile et l’impressionnante baisse des coûts, le portable devient un outil d’intégration économique, de traçabilité et avant tout, de communication.

En général, Facebook, permet de trouver des contacts, Whatsapp est utilisé pour le développement du réseau et Youtube pour faciliter l’apprentissage des langues et garder un lien avec sa culture d’origine. Toutefois, ces réseaux sociaux permettent tout d’abord de garder un contact avec la famille afin de conserver un lien affectif. En étant connecté, les exilés ont pour conséquence une demande de présence plus importante de la part de leur famille. Ils peuvent continuer à participer à distance au quotidien de leurs proches ainsi que de répondre aux devoirs de « l’exilés » attendus par leur famille.

Les frontières numérisées : la traçabilité migratoire

Les étapes du processus migratoire sont fortement connotées sur le plan technologique. En effet, l’exilés à tout intérêt à se familiariser avec les objets portables pour la production et la réception d’informations essentielles voire vitale. « Le téléphone est un passeport, une carte bancaire, une carte vitale, il est une sorte d’expansion du territoire nationale » selon Dana Diminescu.

La frontière aujourd’hui est portée par des données personnelles telles que la date de naissance, les identités, ou encore la localisation. C’est d’ailleurs pour ces raisons que les passeurs confisquent les téléphones pour ne pas être tracés et éviter les vérifications par les forces de police aux frontières. Néanmoins, le téléphone reste indispensable sur le reste du parcours migratoire. Beaucoup de migrants offre sur les réseaux sociaux, des photos, des vidéos sur leur vie afin de garder une trace. Rester connecté devient essentiel, pour demander des précisions géographiques, sur les dangers et les opportunités de la route, enfin laisser en temps réel, des traces numériques.

Vers une réelle inclusion numérique ?

Cependant, bien que la démocratisation des technologies numériques facilite la plupart des exilés à posséder un téléphone, l’accès au numérique n’est pas garanti. L’obstacle principal demeure dans le coût de la connexion qui représente un grand budget pour ces personnes en situation de précarité. La possession du portable ne suffit donc pas, puisque seule la possibilité de rechercher les unités ou le forfait, permettraient d’éviter cette fracture numérique.

Ainsi, l’accès aux services administratifs qui deviennent de plus en plus des « e-administrations » facilitent-ils les démarches ou sont-ils une frontière à l’accès aux droits ?

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *